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19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 17:44
Carlo LUCARELLI  -  "Carte blanche"

J’ai été impressionné par la qualité de ce court roman ( 130 pages ). Il mêle habilement une bonne enquête, crédible et rondement menée, et surtout un contexte historique explorant en Italie la fin de la sombre période mussolinienne. Ce contexte n’est pas développé à outrance, Carlo Lucarelli se contente d’une esquisse qu’il m’a été agréable d’approfondir par des recherches personnels. Attiser la curiosité est une qualité peu fréquente dans un roman.

Bologne, avril 1945. Rehinard, un personnage sulfureux a été assassiné dans son luxueux appartement, vraisemblablement à l’aide d’un coupe-papier. Le commissaire De Luca de la Préfecture de Police est sur la scène de crime, c’est sa première affaire dans sa nouvelle affectation. Il va faire équipe avec l’adjudant Pugliese. D’emblée De Luca montre un sens de l’observation perçant et d’excellentes capacités de déduction. L’enquête ne va pas s’enliser, c’est certain, d’autant plus que sa hiérarchie lui donne carte blanche.

Plus passionnant encore que l’enquête, il y a le contexte historique italien et plus intrigant encore, il y a le passé de De Luca. En peu de mots, par petites touches, Carlo Lucarelli dresse le portrait de la République sociale italienne, héritière agonisante des années de pouvoir du Parti National Fasciste, sinistre Faisceau dont le représentant à Bologne exhorte De Luca lorsque l’enquête lui est confiée «Commissaire De Luca ! hurla-t-il, l'Italie fasciste vous regarde ! Saluto al Duce ! ». A l’époque le Duce ne peut que constater l’avancée inexorable des troupes alliées, il ne dirige même plus les territoires de ce qui est également appelé la République de Salò du fait de l’occupation implacable des nazis allemands. Les attentats des Partisans sont fréquents. Le Comité de Libération Nationale a commencé à ficher ceux qui ont soutenu et collaboré avec le fascisme. Il est temps pour les notables de manœuvrer pour changer de camp. Désormais il y a ceux qui ont peur et d’ultimes fanatiques antisémites traquant les dégénérés, les canailles et francs-maçons, le coupable du meurtre de Rehinard est parmi ces derniers, cela a été imposé à De Luca.

De Luca n’a pas encore sa carte de la Préfecture de Police. Il a celle d’avant, celle où il avait le grade de commandant de la brigade Ettore Muti, Section Spéciale de la Police Politique. Il y a eu jusqu’à seize polices différentes à cette époque, regroupées dans une structure unique, l’OVRA, pour une surveillance et une répression politique tentaculaires. De Luca se défend d’en avoir été un membre actif. Il n’a fait que son travail et il estime l’avoir bien fait. Il a obéi aux ordres. De Luca a été un policier et reste un policier avant tout mais il a peur. Il voit un monde s’effondrer et il devine que le coupable qu’il va démasquer ne correspond pas à celui que les derniers irréductibles fascistes ont imaginé.

Le début de la série De Luca est enthousiasmant. L’amateur de polar que je suis y trouve son compte avec une enquête bien construite, complexe mais pas trop, les protagonistes sont peu nombreux, parmi eux Valeria joue bien son rôle de femme fatale. Le contexte historique est d’une richesse inouï, à la fois propice à embrouiller l’enquête de De Luca et instructif pour les lecteurs qui ne seraient pas familiers de cette page noire de l’Histoire italienne.

Carlo LUCARELLI – Carte blanche . Titre original Carta bianca ( Italie – 1990 ). Traduit de l’italien par Arlette Lauterbach pour la  Série Noire des Éditions Gallimard, parution septembre 1999 . ISBN 9782070497867

Bibliographie de l'auteur ICI  

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